La forme de la philosophie et sa critique. Un atelier avec Lydia Goehr

Il y a deux sortes de philosophes : ceux qui ont une conscience de la forme et ceux qui n'en ont pas. Ce jugement court et provocateur est une expression de la manière dont Lydia Goehr (Columbia University) s'engage avec la philosophie. Le fondement de ce jugement est que pour devenir critiques de leurs propres réifications et de l'enchevêtrement de leurs pensées avec la société, les philosophes doivent comprendre la forme de la philosophie d'une manière distincte : non pas comme un porteur arbitraire de contenu mais comme le moyen par lequel et dans lequel le contenu est matérialisé et spécifié. Par conséquent, les concepts philosophiques ne doivent pas être considérés comme des unités stables et identiques, ils doivent plutôt être considérés comme se chevauchant eux-mêmes dans l'expérience historique. Par conséquent, les aspects esthétiques et rhétoriques de la philosophie ne sont plus marginalisés comme ils le sont dans le courant principal de la philosophie d'aujourd'hui. La forme conceptuelle de la philosophie n'est plus formalisée. 

Cette compréhension dynamique de la forme de la philosophie est au cœur de la pensée de Lydia Goehr, qui s'étend de l'esthétique en général et de la philosophie de la musique en particulier à la philosophie de l'histoire et à la théorie critique. De son séminal "The Imaginary Museum of Musical Works" (1992) à "A Quest for Voice" (1997) et "Elective Affinities" (2008), elle médiatise sa profonde compréhension de la musique avec une approche unique de la philosophie, en particulier de Theodor W. Adorno et Arthur Danto, culminant dans son "Red Sea - Red Square - Red Thread. A Philosophical Detective Story" (2021), un livre aussi riche en pensée qu'il est subtil dans son ton. Cet atelier s'intéressera aux motifs centraux de la propre philosophie de Goehr, à sa manière d'assimiler la philosophie et l'art tout en les maintenant distincts, et aux effets critiques et politiques de cette entreprise.&nbsp ;